“Le tissage de notre identité n’est pas uniforme” par Alia Hogben*

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Je ne peux qu’adhérer à ce que dit cette dame, d’autant qu’elle parle d’Amin Maalouf à travers un autre livre de l’auteur…Je suis une Franco-Malgache et fière de l’être.

Je vous invite également à lire d’autres articles mis en liens en fin de ce billet.

*Alia Hogben, directrice du Conseil canadien des femmes musulmanes réfléchit à la complexité de son identité en s’inspirant du livre Les Identités meurtrières de l’écrivain franco-libanais Amin Maalouf.
(Source : The Whig Standard, 23 octobre 2010)
Article abrégé distribué par le Service de Presse de Common Ground (CGNews) avec l’autorisation de l’auteure. Texte disponible dans son intégralité, en anglais, sur www. thewhig.com
Reproduction autorisée.

Kingston (Canada) – Je suis sans doute un peu lente.
Ce n’est que très récemment que j’ai pris conscience, à ma grande surprise, qu’une des facettes de mon identité, multiple, était occidentale – les autres étant indienne, birmane et musulmane.
Ayant vécu dans différents pays, j’ai absorbé un grand nombre de religions et de cultures diverses, sans pour autant me rendre compte que cinquante ans de vie au Canada faisait de moi une Occidentale, et fière de l’être.

Si je n’ai pas été consciente de cette appartenance jusqu’à présent, c’est peut-être, notamment, à cause de la façon dont les autres me perçoivent. On m’identifie apparemment surtout selon ma religion plutôt qu’autre chose – comme c’est d’ailleurs le cas pour tous mes coreligionnaires musulmans.

Dans son livre Les Identités meurtrières, l’écrivain franco-libanais Amin Maalouf affirme que ceux qui disent avoir une identité multiple sont souvent marginalisés, parce que les autres ne les perçoivent qu’à travers une seule facette de leur identité.

L’auteur dit à propos de sa propre identité, qu’il est à la fois Arabe chrétien, Libanais et résident français de longue date et que ses appartenances ont évolué au fil des ans, pour englober tout son vécu. A ses yeux, l’identité renferme de nombreuses appartenances, mais, lorsque l’une d’entre elles est menacée – comme par exemple la religion – on a tendance à s’y rattacher tout particulièrement.

Ce comportement – le fait de se rattacher à une seule facette de son identité – n’est pas positif car il aboutit à un sentiment d’appartenance à un seul et unique groupe, au détriment des autres.
Les personnes qui viennent d’émigrer doivent accepter que leur pays d’accueil possède sa propre histoire, ses traditions et ses valeurs et comprendre que si l’avenir d’une nation n’est pas une simple extension de son histoire, son passé a néanmoins un certain poids.

Amin Maalouf compare l’histoire du monde musulman à celle de l’Occident et en conclut que
les musulmans, confiants et tolérants par le passé – à l’époque où leur culture était en plein essor – se sentent aujourd’hui menacés, avec le déclin de celle-ci.

Au cours de ces derniers siècles, l’Occident a vécu une révolution – révolution scientifique, technologique, industrielle, intellectuelle et morale. De nombreux facteurs expliquent pourquoi cela s’est produit en Occident et non pas ailleurs. En tout cas, ce qui en découle, c’est qu’elle en sort prédominante.

Selon Amin Maalouf, le reste du monde, amer et en proie à une profonde crise d’identité, reconnaît l’essor de l’Occident mais le fait un peu à contrecœur. L’auteur remarque qu’on ne prend pas assez en considération l’influence des gens sur la religion et qu’on fait même plutôt le contraire. Selon lui, issue de passés différents, l’Europe a modernisé le christianisme tandis que la majorité des pays du monde musulman ont stagné sous le colonialisme et se sont peu développés.

Cependant, il affirme :
«qu’aucune doctrine n’est, par elle-même, nécessairement libératrice, toutes peuvent déraper, toutes peuvent être perverties, toutes ont du sang sur les mains, le communisme, le libéralisme, le nationalisme, chacune des grandes religions, et même la laïcité. Personne n’a le monopole du fanatisme…»

Par ailleurs, Amin Maalouf explique une des raisons de la montée du fondamentalisme dans le monde arabe. Il rappelle que le président égyptien Gamal Abdel Nasser, considéré comme un grand héro, était l’ennemi juré des groupes religieux qui avaient une ambition politique ; la réponse du dirigeant égyptien à ces mouvances qui exigeaient un plus grand rôle au sein du gouvernement a justement incité les gens à se tourner vers le radicalisme religieux.

L’auteur pense que les Arabes dont il fait lui-même partie n’ont été tentés par la voie du fondamentalisme qu’à partir du moment où toutes les autres routes étaient barrées. D’ailleurs, les mouvements islamiques actuels sont un produit de notre temps et ne font pas partie de l’histoire musulmane.

La question délicate est de savoir pourquoi tant de gens, surtout dans les pays à majorité musulmane, tiennent à affirmer leur identité religieuse plus fortement que leurs autres appartenances?

Pour les musulmans, l’identité religieuse transcende les frontières de la race, de l’ethnicité et du nationalisme et leur donne le sentiment réconfortant que la communauté des fidèles est universelle.

Amin Maalouf apprécie la valeur d’une tribu planétaire, mais pour lui, celle-ci devrait inclure toute l’humanité et attacher une grande importance aux droits humains universels, qui permettent aux gens de vivre en tant que citoyens à part entière – de ne pas être persécutés, de pouvoir accéder au savoir, de pouvoir choisir ce qu’ils aiment et ce en quoi ils croient, de respecter la liberté des autres et enfin de vivre une vie décente et honorable.

L’écrivain a raison : nous devons célébrer toutes les facettes de notre identité – y compris le sentiment d’appartenance à la tribu humaine de notre planète – et prendre conscience que les identités individuelles ou communautaires fluctuent et peuvent évoluer en fonction des nouvelles expériences vécues. Cela donne vraiment de l’espoir.

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