«Le ramadan autour du monde» de Juliette Schmidt (édité)

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Edit ce 28 août 2010 : à propos de CGNews que je trouve très intéressant pour suivre les relations occidento-musulmanes, je n’ai pas l’intention de reproduire tous les articles qui me « parlent » tous autant les uns que les autres. Je relève ce qui m’interpelle sur l’instant…A propos du ramadan qui a lieu actuellement, j’aime comprendre ce que c’est, alors…Voici donc les deux billets de  Juliette Schmidt à ce sujet.

Le ramadan dans le monde : Liban, Indonésie et Guinée
par Juliette Schmidt
27 août 2010
Source: Service de Presse de Common Ground (CGNews), 27 août 2010, http://www.commongroundnews.org Reproduction autorisée.

Toronto – J’avais entamé, la semaine dernière, un tour virtuel du ramadan dans le monde, basé sur les récits de mes collègues marocain, pakistanais et américain à Search for Common Ground. Cette semaine, alors que même Toronto bruit d’invitations à des dîners de rupture du jeûne ( iftar), je me tourne vers le Liban, l’Indonésie et la Guinée.

Nour Awaiss, éditrice de l’édition française et arabe du Service de Presse de Common Ground pour le Moyen-Orient, s’interroge sur son expérience de chrétienne libanaise pendant ce mois où un grand nombre de ses compatriotes musulmans jeûnent et esquisse un parallèle avec l’atmosphère qui entoure les fêtes chrétiennes : rassemblement des familles à Noël, joie des enfants le dimanche des Rameaux, hommage aux morts à la Toussaint.

Cela ressemble, selon elle, à un repas de Noël : “La célébration de la fin du Ramadan, l’Aïd el-Fitr, est l’occasion, pour toute la famille, de participer à un repas de fête au village après la prière du matin qui marque la fin du mois du mois sacré”.

Un autre collègue libanais, Ali Dahwich, directeur des finances et de l’administration, explique : « Je vais aller à Tyr, ma ville natale dans le Sud, pour partager le déjeuner avec ma famille. Trente cousins, oncles et tantes vont se retrouver autour d’assiettes généreusement garnies d’agneau farci et méchoui.

Tout comme dans les jours qui précèdent le dimanche des Rameaux, qui célèbre l’entrée de Jésus dans Jérusalem une semaine avant Pâques, “les jours avant l’Aïd el-Fitr, la fête du dernier jour du ramadan, les magasins de vêtements sont bondés et les parcs de loisirs envahis par les enfants. Dans leurs habits tout neufs, ils se laissent griser par la magie de cette fête sacrée”.

Un peu comme les catholiques honorent leurs morts le Jour des Morts, le matin de l’aïd « certaines familles musulmanes se réunissent autour des tombes de leurs défunts pour lire la fatiha (le premier chapitre du Coran) en mémoire de leurs ancêtres” rappelle encore Nour Awaiss.

Au Liban, les fêtes religieuses de toutes les grandes confessions sont des jours fériés officiels pour tous. “La vie est belle au Liban”, conclue-t-elle, “tous les jours de fête”.

Le ramadan est aussi bon pour les affaires, un effet qui est particulièrement bien reçu en Indonésie.

Agung Yudhawiranata, coordonnateur de programmes et éditeur pour le bahasa indonesia, explique: “Le changement d’horaires a un effet sur les affaires. Les restaurants et établissements de loisirs réduisent leurs horaires d’ouverture ou voilent leurs fenêtres de rideaux noirs pendant la journée. Les déjeuners d’affaires ont été remplacés par des repas de
buka puasa (rupture de jeûne ou iftar). Mais auparavant, tous doivent souffrir dans les embouteillages records qui encombrent les rues au moment, juste avant le coucher du soleil, où chacun se presse de rentrer chez soi pour rompre le jeûne avec la famille”.

S’adaptant à cet horaire du ramadan, «les commerces, entreprises, bureaux et administrations organisent des soirées pour leurs collègues, leurs clients, leurs employés et leurs familles. Les affaires vont bon train et les relations d’affaires sont réaffirmées à l’occasion des réunions du buka puasa».

A l’époque du ramadan, les embouteillages, qui compliquent une circulation déjà problématique à Djakarta, ne sont pas le seul problème. D’après Agung Yudhawiranata, “en vertu d’un étrange phénomène économique, les prix des aliments de base s’envolent, frappant durement les familles qui, après un bond des tarifs de l’électricité en juillet, ne peuvent plus se permettre d’acheter ces aliments”.

En Guinée, si l’essentiel des aspects spirituels et culturels du ramadan sont comme ceux des autres pays, ils sont néanmoins modulés par le contexte unique de ce pays.

Safiata Barry, adjointe à l’administration et aux finances du bureau de Conakry explique : “Ici, en Guinée, le ramadan est un mois très spécial où nous prions, nous jeûnons et passons du temps auprès de nos familles. Comme dans les autres pays musulmans, nous jeûnons toutes la journée, jusqu’à la prière du soir après le coucher du soleil”.

“Après la prière, famille et amis se réunissent pour rompre le jeûne. Traditionnellement, nous mangeons du riz accompagné de poulet, de viande ou de poisson avec des légumes, du fonio (céréale très appréciée en Afrique de l’ouest) et du gruau. Ensuite, nous nous asseyons pour bavarder et regarder la télévision – quand l’électricité marche”.

Safiata ajoute : “Pour le ramadan, les hommes envoient de l’argent et des noix de cola à leurs beaux-parents en signe de respect”.

Mais, comme la plupart de mes collègues qui font le ramadan, elle souligne que ce mois sacré signifie bien plus que le jeûne, la bonne chère et les présents : “Le ramadan me donne l’occasion de penser à ceux qui ont moins de chance. Je ressens vraiment la faim et peux donc comprendre ceux qui vivent tous les jours sans manger.”

Le ramadan autour du monde: Maroc, Pakistan et Etats-Unis
par Juliette Schmidt
20 août 2010
Source: Service de Presse de Common Ground (CGNews), 20 août 2010, http://www.commongroundnews.org
Reproduction autorisée.

Toronto – Travaillant avec une équipe internationale et pluriconfessionnelle au sein de Search for Common Ground (SFCG) – organisation non lucrative ayant pour objet la transformation des conflits – , j’ai pu constater que les effets du ramadan ne s’exercent pas uniquement sur ceux de mes collègues qui adhèrent à un régime alimentaire et à un mode de vie qui laisse davantage de temps libre pour la réflexion spirituelle ; c’est aussi l’occasion de rencontres de l’équipe, à travers les fuseaux horaires, programmées autour de l’iftar (rupture du jeûne), l’occasion de mieux comprendre ceux qui font une longue journée de travail sans manger ni boire.

Le ramadan, c’est certainement un peu plus que jeûner pendant la journée et rompre le jeûne chaque soir. Pour beaucoup c’est un voyage d’un mois vers la lumière spirituelle et la pratique de l’autodiscipline et de l’humilité, pendant lequel les musulmans s’abstiennent de commérer, de jurer, de se mettre en colère, d’avoir des contacts sexuels (pendant les heures de jeûne) et de se livrer à de mauvaises pensées, tout en poursuivant leur activité quotidienne.

D’une personne à l’autre, mais aussi d’un pays à un autre, ce voyage est différent. Le souci de certains est de battre leur record en matière de jeûne et de capacité de travail, alors que d’autres retrouvent un calme et une attention absolus. Si bien que partout dans le monde le ramadan est l’occasion d’un mélange unique de spiritualité et de culture.

A Islamabad, Rashad Bukhari, conseiller de notre programme pakistanais et éditeur urdu du Service de Presse de Common Ground, explique : « Dès le début de ramzan, comme on dit au Pakistan, la vie change du jour au lendemain. Ce n’est pas seulement un changement des habitudes alimentaires et des horaires, mais aussi un changement d’atmosphère. Les gens prennent conscience de leur rapport à Dieu et aux hommes par la prière, la supplication et le don ».

Pour la plupart des gens, c’est une expérience spirituelle et culturelle. « Ma famille se lève dès 3 heures », explique M. Bukhari. « Ma femme prépare les parathas (galettes de pain feuilletées et frite), une omelette, un bol de yaourt et autres ingrédients du sehri (le petit-déjeuner d’avant l’aurore, suhoor en arabe) qui doivent être assez énergétiques pour nous permettre de tenir jusqu’à l’iftar. Celui-ci se compose généralement de pakoras (beignets de farine de pois chiche), de samosas, de dahi bhalleys (yaourt avec beignets et oignons) et de chaat (salade de fruits épicée) ».

Un bourdonnement flotte dans l’air : « Les marchés ouvrent avant l’aube et reprennent leur activité fébrile avant le dîner du soir. Les mosquées sont pleines aux heures de prière. Cette année, cependant, le ramzan est arrivé pendant la pire inondation dans l’histoire du Pakistan. Les festivités sont entachées de la tristesse pour les vies perdues et les personnes déplacées. Comme il se doit, le ramzan de cette année se vit dans la compassion pour ceux qui ont un besoin urgent de nourriture et d’abris ».

Au Maroc, Alae Eddin Serrar, directeur de programme de SFCG à Rabat, nous dit : « Cette année le ramadan est tombé pendant un été chaud. Mais, comme toujours, il est arrivé dans le même esprit de paix, de pardon et de plénitude. Pendant un mois, le ramadan transporte les musulmans de tout le Maroc vers un monde de sérénité et de spiritualité. Pour la plupart des Marocains, ce mois sacré est une occasion annuelle de se purifier par l’abstinence, de fortifier leur âme en se rapprochant de Dieu et de se livrer à une introspection qui fera d’eux des êtres meilleurs ».

C’est l’époque où le regard se porte autant vers l’extérieur que vers l’intérieur. « Au ramadan, les gens se rencontrent en famille et partagent de bons dîners. Les plats préférés de ce mois sacré sont la harira (soupe à la tomate et aux herbes), les chabakia (gâteaux au miel) et le sellou (dessert à base d’amandes et de graines de sésame). Certains passent la soirée dehors, rencontrent leurs amis au café, d’autres regardent de nouvelles émissions à la télévision.Les enfants se réjouissent des nouveaux habits qu’ils reçoivent pour l’Aïd el-Fitr, qui marque la fin du jeûne ».

Aux Etats-Unis, où les restaurants fonctionnent aux horaires normaux et où la majorité des gens ne font pas le jeûne, Leena El-Ali, directrice des relations islamo-occidentales et des programmes pour le Moyen-Orient et l’Afrique du nord à SFCG, s’étonne : « C’est drôle, au pays, les gens croient que c’est difficile pour moi d’observer le ramadan depuis que j’ai quitté le Liban pour vivre dans la diaspora, à Londres, d’abord, et maintenant à Washington. Au fond, c’est au cours de ces 21 ans où j’ai vécu en Occident que le sens profond du ramadan m’a été révélé. D’abord, par l’exemple des convertis, qui, par définition, sont plus conscients du sens profond des rites musulmans. Ensuite, par la solitude relative que j’éprouve au sein d’une société non musulmane et qui me permet de développer moi-même une réflexion et une recherche personnelles, même en l’absence d’un contexte social facilitant naturellement une telle expérience. Dans tout pays non musulman où la liberté de religion est assurée, il n’y a pas à s’apitoyer sur les musulmans. C’est un environnement qui nous pousse implicitement vers la grande djihad – le combat intérieur – qui compense plus que largement toutes les difficultés extérieures que nous pourrions rencontrer ».

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* Juliette Schmidt est la directrice adjointe, à Search for Common Ground, du Programme Partenaires pour l’Humanité sur les relations islamo-occidentales.

Une réponse

  1. Pascal Hilout (anciennement mohamed Hilout) nous parle de l’Islam.